Tout le monde sait que le rugby est née dans l’université de rugby, d’où son nom. Mais il aurait très bien pu s’appeler le «London rules» ou le «Rugby de Londres». En effet, la vrai naissance légale de ce sport c'est le 26 janvier 1871 au restaurant Pall Mall de Londres, en présence de 21 clubs exclusivement londoniens. C’est à cette date que 21 clubs qui jouaient à un « football-rugby », inspiré de celui de l’université de rugby, décident enfin de créer une fédération (RFU - Rugby Football Union) digne de ce nom pour harmoniser et encadrer les règles. On comprend mieux l’importance que cette ville a joué pour ce sport.
Repères géographiques
Pour bien appréhender ce que représente Londres, il faut pouvoir la comparer. Lorsqu’on parle de «Londres», on parle du «Grand Londres», c’est-à-dire des 32 arrondissements que forment cette mégapole.
En superficie, le Grand Londres est 10 fois plus grand que Paris intra-muros. Cela représente en peu plus que Paris (intra-muros) avec ses 3 départements limitrophes (Seine-Saint-Denis + Val-de-Marne + Hauts-de-Seine). Mais il est 7 fois moins grand que la superficie de la totalité de l’Ile-de-France.
En chiffres cela donne :
- Londres = 32 arrondissements - 1 579 km² - 7,8 millions d’habitants
- Paris = 20 arrondissements - 105 km² - 2, 2 millions d’habitants
- Ile-de-France = 6 départements - 12 011 km² - 11,6 millions d’habitants
Administrativement, le Grand Londres forme une des 9 régions de l’Angleterre. Tandis que Paris ne forme qu’un département de la région Ile-de-France. La vraie ville de Londres est son centre historique que l’on nomme «Central London» qui regroupe 3 quartiers historiques : la City (le cœur historique de la ville de Londres), le West End (le grand quartier de la cité de Westminster) et South Bank (quartier sur la rive sud de la Tamise). Cette entité informelle pourrait être comparée à Paris en taille et en histoire.
Beaucoup de chroniqueurs s’étonnent du fait que Paris ne soit pas une capitale du sport à l’image de Londres et tous ses clubs de rugby et de football professionnels. Sauf que Londres est dix fois plus grande que Paris, d’où la place pour construire des stades et se partager une manne énorme de supporters dans des quartiers 10 fois plus grands. Il aurait fallu aussi que les départements limitrophes de Paris soient aussi prospères et florissants que les quartiers londoniens de l’époque. Je veux dire que si chaque département de l’Ile-de-France avait construit son stade propre et encouragé son propre club local plutôt que laisser la place aux seuls 2 clubs parisiens, une dynamique aurait pu naître.
Implantation des clubs
Quand on regarde la carte des implantations des clubs de rugby actuels à Londres, on s’aperçoit qu’ils sont quasiment tous situés à l’ouest. On découvre aussi que sur les 4 grands clubs professionnels de la région (London Irish, Wasps, Saracens et Harlequins) seul 1 joue vraiment dans la grande ville. Et encore le célèbre Stoop, le stade des Harlequins, est à environ 20 km du cœur de la capitale. Comme si vous deviez aller à Versailles pour voire le Stade Français.
Pour les 3 autres, vous devez carrément quitter la région de Londres et vous aventurer dans des villes des comtés limitrophes. Le plus loin étant le stade du London Irish, situé dans la ville de Reading à 60 km de Londres. Comme si le club de rugby de Beauvais s’appelait «Paris Rugby Club» ! ! !
Londres et sa périphérie forme LA région de rugby avec 9 clubs dans les 3 divisions (et 6 de plus dans des divisions inférieures) . Il n’y a pas d’équivalent en Angleterre. Seules les régions Toulousaine ou celle du Béarn-Pays Basque réunies pourraient rivaliser en Europe.
Les clubs
Sur la carte, j’ai mis les clubs qui jouent actuellement dans les 3 premières divisions (la Premiership, le Championship et la National League 1). Sans doute cette carte sera modifiée avec les montées et les descentes. La certitude c’est que les 4 grands clubs pro ne devraient plus être amenés à descendre tellement ils font parti de l’institution du rugby anglais. Leurs riches propriétaires et la colère des supporters auront pris les devants pour éviter le pire.
Les quatre grands
LONDON WASPS
Ils jouent au stade de Adams Park (capacité d’environ 10 000 places), situé prés de la ville de High Wycombe (petite agglo de 160 000 habitants, l’équivalent de Toulon) dans le comté du Buckinghamshire, à 50 km de Londres.
Le club fait parti des 21 clubs fondateurs du rugby anglais, malgré son absence (l’histoire veut que le représentant du club était absent à la réunion du 26 janvier 1871 car il avait eu une mauvaise adresse). Il est amusant de signaler que le club est née de la scission du club de Hampstead FC dont l’autre partie a formé les Harlequins.
LONDON HARLEQUINS
Ils jouent maintenant au Stoop (capacité d’environ 14 000 places). Situé à 20 km à l’ouest de la ville, il jouxte presque le grand stade de Twickenham. A cause de la scission avec les Wasps, il existe une forte rivalité entre les deux clubs. Il était de la réunion des 21.
SARACENS
Ils jouent au stade de Vicarage Road (capacité d’environ 19 000 places), situé à Watford (ville de 80 000 habitants, l’équivalent de Pau) dans le comté de Hertfordshire, à 32 km de Londres. Ce club ne fait pas parti des clubs fondateurs de la RFU et a connu beaucoup atermoiements avant de devenir une référence dans la fin des années 90 avec l’arrivée d’un propriétaire millionnaire. Leur nom reste une énigme. Ce que l’on sait c’est qu’à l’époque de la naissance du rugby, les clubs prenaient souvent des noms exotiques : les "Gitans", les "Nomades ", les "Mohicans", etc… D’autres avancent que ce serait pour se singulariser face à des clubs qui prenaient des noms comme "Crusaders", "Knights",…
Plus récemment le club a été racheté par des investisseurs sud-africains. Il faut dire que Londres a connu une vague d’immigration de blancs Sud-Africains avec la fin de l’Apartheid. Quelque 841 000 Sud-Africains blancs ont quitté leur pays entre 1995 et 2005. On a appelé cela « la fuite des cerveaux blancs ». Pas étonnant qu’ils se soient intéressés au rugby. Les proprios n’ont pas hésité à recruter en masse dans leur pays (jusqu’à 13 joueurs à forte connotation Springbok). Du coups le club est devenu une quasi franchise du rugby sud-africain.
LONDON IRISH
Ils jouent au stade de Madejski (capacité de 24 000 places, le plus grand des 4 clubs pro londoniens mais qui est en fait la propriété du club de football local), situé à Reading (agglo de 230 000 habitants, l’équivalent de Limoges) dans le comté de Berkshire, à 60 km de Londres. Mais en réalité, le siège du club est à Sunbury dans le Surrey à 30 km du centre de Londres.
Ce club est l’émanation de la communauté d’immigrés irlandais venus au siècle dernier et qui ont fondé leur propre association sportive comme l’on fait d’autres communautés (les Ecossais avec le "London Scottish", les Gallois avec le "London Welsh" ou les Corniques avec le "London Cornish").
Le club ne connaîtra la lumière qu’en 1990 avec la montée en division 1. En 1999, le club subit de grosses difficultés financières et décide d’ouvrir son capital aux supporters qui en deviennent les propriétaires.
En 2ieme division
LONDON WELSH
Ils jouent dans un stade de 5 800 places qui fait parti d’un complexe sportif, le Old Deer Park, dans l’ouest de Londres.
Le club a failli intégré la ligue Celtique en 2009 mais s’est rebiffé. Passé à l’ère du professionnalisme, ce club cherche à imiter le London Irish en s’associant à un club de football pour disposer d’un stade lui permettant d’intégrer les grandes compétitions.
ESHER
Club de rugby apparu dans les années 20 qui joue pour une petite commune de 8000 âmes en périphérie de Londres dans le comté du Surrey. Ce club ressemble plus à un club moderne de fédérale française sans passé glorieux ni ambitions particulières.
En 3ième divsion
BLACKHEATH
Seul club au centre de Londres un peu au sud dans l’arrondissement de Greenwich. Il est le seul à n’avoir jamais déménagé depuis sa création. Il est une véritable institution du rugby anglais et fait parti des 21 clubs fondateurs. Il est même un des clubs fondateurs de la célèbre Football Association (la fédération de football anglaise) qu’il quitte pour rejoindre la pratique du rugby, lors du grand schisme.
ROSSLYN PARK
A l’ouest de la capitale, il se situe dans l’arrondissement de Wandsworth. Il fait parti de ces petits clubs historiques toujours en activité qui alimentent les chroniques du rugby local. Il a la particularité d’être le premier à avoir fait un déplacement en France pour affronter le Stade Français à Paris le 18 avril 1892, sous les yeux du Baron de Coubertin.
EALING
Club centenaire, il ne fait pourtant pas parti des clubs qui participa à la réunion des 21. Il a changé plusieurs fois de terrain pour finalement aboutir à l’ouest dans l’arrondissement de Ealing. Il est reconnu pour sa formation auprès des jeunes et son nombre de licenciers qui est des plus important de Londres.